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Bouddhisme au féminin - Partageons nos aspirations, nos questionnements, nos compréhensions

 

 

Vos Contributions et Témoignages

 

 

 

A propos de la DUDH (déclaration universelle des droits humains)

A l'occasion du 60ème anniversaire de la déclaration universelle des droits humains, je voudrais paratager avec les lectrices et lecteurs quelques réflexions sur ce qui fonde la DUDH.

Il a été question récemment de mettre dans la charte de l'Union européenne la reconnaissance de nos racines "chrétiennes." Que, pour des raisons d'ordre politique, cela ne se soit pas fait n'est pas la question, mais nous devons admettre que ce sont les valeurs même du christianisme, et en particulier l'affirmation de la valeur intrinsèque de chaque personne qui constituent les fondements mêmes de la DUDH.

Dans l'émission de Sagesses Bouddhistes avec Khandro Rimpoche traitant de la violence, celle-ci se voit demander si l'augmentation de la violence est un phénomène propre à l'Occident. Khandro Rimpoche répond que l'Occident en est plus conscient, c'est cela la différence. La violence existe également en Asie, mais la perception de cette violence est moindre.

Effectivement, l'Occident regarde comme inacceptable et condamnable toute violence exercée sur les plus vulnérables, enfants, femmes, personnes âgées, handicapés, alors que l'Asie n'a pas cette culture de la valeur de l'individu.

Celui-ci est au service de la communauté, et cela est particulièrement vrai en ce qui concerne les femmes dont on attend comme normal une perpétuelle abnégation et un constant sacrifice de toute considération ou aspiration personnelle, et d'ailleurs, la violence qui s'exerce sur elles n'est pas perçu comme répréhensible ou punissable par la loi.

La Chine est intimement imprégnée des valeurs confucéennes qui visent à une harmonie sociale et ne s'intéressent pas à l'individu qui doit être tout entier au service de la société, dans une vision hiérarchisée où les femmes sont tout en bas de la pyramide, muettes et obéissantes à tous.

Dans la culture indienne, l'homme est la « substance » et la femme « l'ombre » qui se doit de se consacrer à son mari-gourou qui a tous les droits sur elle.

Dans la perspective bouddhiste telle qu'elle est transmise par les traditions populaires, la place de chaque individu est regardé comme le résultat de son « karma », autrement dit, comme résultat des actes commis dans d'autres existences, aussi la violence et l'injustice ne sont-elles pas perçues comme en Occident.

Je renvoie les lectrices à ce que Alexandra David-Neel a écrit sur cette question du karma.

Dans l'Asie bouddhiste en général, la perspective de l'illusion du moi ainsi que celle de la réincarnation, donc de l'espérance d'une meilleure future incarnation abaisse singulièrement le seuil de tolérance de l'injustice et de la souffrance, et donc la nécessité de mettre en pratique les principes de la DUDH.

Cette différence de perspective entre chrétiens et bouddhistes a pour conséquence une multiplication d'actions admirables de secours aux opprimés de la part des chrétiens et l'absence de ces actions chez les bouddhistes.

J'en conclus que l'Occident n'apporte pas que du mal au monde et que les principes bouddhistes doivent être maniés avec précaution pour ne pas entraîner une indifférence aux souffrances et aux injustices que subissent les autres – particulièrement les femmes et les fillettes - en arguant que c'est leur karma, que de toute façon le moi est une illusion et que le monde n'est que samsara, une attitude extrêmement commode quand on n'est pas soi-même en train de subir ces injustices et ces souffrances. Josyane

 

Freud et le Bardo Thodol

Freud a fait découvrir au XIXème siècle pudibond à l'extrême, les pulsions sexuelles existant chez un enfant.

Or, dans le Bardo Thodol, il est dit que, au moment de la renaissance, si l'entité qui est attiré dans la matrice est un garçon, il souhaite être à la place du père qu'il déteste et éprouve un violent attrait pour la mère.
Symétriquement, si c'est une fille, elle souhaite être à la place de la mère qu'elle déteste et éprouve un violent attrait pour le père.

Et tout le monde occidental de s'exclamer : Ah, tout de même, ces Tibétains, ils sont forts, des centaines d'années avant Freud, ils savaient déjà tout.

Je ne peux m'empêcher de demander qui est l'auteur du Bardo Thödol ? une homme, une femme ?

Qu'est-ce que cette "symétrie" alors que l'évidence de tous les jours nous montre que le comportement sexuel d'un homme n'est pas du tout le même que celui d'une femme ?

Revenons à Freud, ses déclarations péremptoires sur la sexualité féminine (qu'il regardera plus modestement vers la fin de sa vie comme "le continent noir") ont fait longtemps considérer comme de simples fantasmes les agressions sexuelles dont de nombreuses fillettes se disaient victimes, de part d'un père, d'un frère, d'un oncle ou de tout autre personnage masculin de leur entourage. Il a fallu beaucoup de temps, beaucoup de souffrances pour que des incestes soient reconnus et punis par la loi. La domination et la violence vécues dans les familles restaient en dehors de la sphère publique et donc en dehors du pouvoir de la loi. Et aujourdhui, la pédophilie s'affiche au grand jour et recrute sur internet.

Rappelons donc cette évidence : en matière de sexualité, il n'y a pas symétrie entre l'homme et le femme. Une rencontre, pour une femme, c'est avant tout la rencontre d'un autre être auquel elle prend le risque de se donner. Pour un homme, une rencontre, c'est avant tout la recherche de la jouissance par le corps de l'autre.

Lorsque le Bouddha parle du désir et de la souffrance qu'il entraine, cela est particulièrement vrai en matière de sexualité, mais le désir est d'un coté et la souffrance de l'autre.
Abandons, prostitution, pornographie, perversions, sadisme et meurtres mêmes, tout cela des femmes et des enfants le subissent, et ce sont des hommes qui en sont les auteurs.
La somme de cette souffrance est incommensurable. Mais le poids de la domination masculine est tel qu'une femme ose à peine le dire ! Cela dérange les hommes, l'image qu'ils ont d'eux-mêmes. Aussi, par un tour de passe-passe et un beau phénomène de projection, on trouve, sous la plume de Freud mais aussi du Bardo Thodol, qu'en réalité, les hommes et les femmes, dans ce domaine, c'est pareil.

Justement, revenons à l'affirmation du Bardo Thodol quant aux sentiments éprouvés par l'entité à naître. Est-ce qu'il n'y a pas là une négation pure et simple de la différence biologique entre hommes et femmes ?

Il n'est pas possible pour un homme d'avoir une relation sexuelle sans jouissance, tandis qu'il est possible pour une femme de subir une relation sexuelle non désirée et même de concevoir un enfant non désiré. Sans oublier que de nombreuses femmes ne connaissent aucune jouissance sexuelle lors d'un rapport, même accepté et même avec quelqu'un qui leur est cher affectivement parlant.

Au moment même où vous lisez ces lignes, combien de femmes dans le monde subissent des relations sexuelles non désirées ? Toutes celles qui sont mariées sous la contrainte, que ce soit à un vieillard dégoutant ou à un homme violent ou grossier, toutes celles qui ont peur de se retrouver à nouveau enceintes sans le vouloir, qui sont épuisées et ne peuvent se dérober à une étreinte imposée. Et que dire de la prostitution, et des guerres où les femmes sont considérées comme territoire conquis et violées sans le moindre état d'âme par de braves pères de famille ?

Peut-on vraiment penser que si l'enfant d'un viol est une fille, elle a pu "vouloir se trouver à la place de la mère" ? Qui peut écrire ce genre de chose si ce n'est un homme, incapable de se mettre à la place d'une femme ?

Je veux ici, par cette contribution, mettre en garde les femmes quand elles lisent ce genre d'affirmation.

Du point de vue bouddhiste, nous pouvons dire que nous sommes toutes et tous, en raison d'une loi biologique, le résultat d'un désir sexuel masculin. Nous portons en nous ce désir premier dont nous devons nous libérer, mais nous ne sommes pas forcément le résultat d'un désir féminin.
Cette vérité biologique ne se rencontre guère dans les textes bouddhiques !!

Ne jamais rien croire aveuglément; c'est la devise du bouddhisme, appliquons-là à tous les écrits, quels qu'ils soient, même quand ils sont auréolés du prestige de la tradition.
N'oublions pas que pratiquement tous les écrits, toutes les doctrines, tous les enseignements sont le fait d'une plume, d'une réflexion et d'une expérience masculine.
Danièle

 

Etre Chrétien et bouddhiste

Dans Sagesses bouddhistes en septembre dernier, un témoignage très intéressant de Eric Vinson, qui a été dès l'enfance en contact avec le bouddhisme tibétain (il a pris refuge à l'âge de onze ans, avec son père !!) tandis que sa mère était orientée vers le christianisme. Il a décidé de consacrer sa vie à la spiritualité et il est à la tête d'un journal tout à fait chrétien qui s'intitule Prier.

C'est un choix qui interpelle. Comment arrive-t-il à établir un pont entre bouddhiste et christianisme sans en être écartelé?

Eric Vinson dit que cela ne lui pose jamais de problème de dire qu'il est chrétien chez les bouddhistes, mais que le contraire n'est pas vrai et qu'il reste discret (en passant à Sagesses Bouddhistes sur France 2 !!!) sur l'aspect bouddhiste de sa quête intérieure.

Tout de même, on ne peut que se dire qu'il a dû adapter le dogme chrétien à un certain nombre de vérités bouddhistes incontournables, sinon, comment peut-il se dire bouddhiste et chrétien ?

Le christianisme est à la recherche d'outils d'approfondissement de la vie intérieure et c'est certain que la méditation bouddhiste remplit un vide. Lire le témoignage d'un moine, Zazen est alors regardé comme un moyen, hors de toute perspective théologique.

Mais faire zazen ne signifie pas du tout reconnaissance de la valeur du bouddhisme en tant que voie de salut. Certains écrits chrétiens actuels montrent qu'on est loin d'une mise en cause du dogme et d'une compréhension par la hiérarchie catholique en particulier d'une approche religieuse différente de la leur.

J'ai eu l'occasion de trouver sur internet un texte écrit par le Benoit XVI (alors qu'il était encore le cardinal Ratzinger sous l'autorité de Jean Paul II), texte qui remettait les pendules à l'heure au sujet d'un ouvrage où un chrétien sincère avait tenté d'appréhender la pluralité des religions.

Lire le texte en pdf

ici le texte en ligne

Je souligne juste quelques passages :

•  Il faut croire fermement que l'Eglise est signe et instrument de salut pour tous les hommes. [12] Il est contraire à la foi catholique de considérer les diverses religions du monde comme des voies complémentaires à l'Eglise pour ce qui est du salut. [13]

• Selon la doctrine catholique, il faut tenir que: ce que l'Esprit fait dans le coeur des hommes et dans l'histoire des peuples, dans les cultures et les religions, remplit une fonction de préparation Évangélique (cf. Const. dogm. Lumen gentium , n. 16) Il est donc légitime de soutenir que l'Esprit Saint pour sauver les non-chrétiens, utilise aussi les éléments de vérité et de bonté qui se trouvent dans les diverses religions, mais considérer comme voies de salut ces religions, prises comme telles, n'a aucun fondement dans la théologie catholique; en effet, elles présentent des lacunes, des insuffisances et des erreurs [16] sur les vérités fondamentales regardant Dieu, l'homme et le monde.

En outre, le fait que les éléments de vérité et de bonté des différentes religions puissent préparer les peuples et les cultures à accueillir l'événement salvifique de Jésus-Christ, ne suppose pas que les textes sacrés des autres religions puissent être considérés comme complémentaires à l'Ancien Testament, qui est la préparation immédiate à l'Avénement du Christ. [17]

Honnêtement, il me parait difficile de dire qu'il n'y a pas de problème à être à la fois bouddhiste et chrétien !

Vouloir construire des ponts n'est possible que si la personne en face ne vous dénie à priori la valeur de votre approche, ce qui malheureusement, semble être encore la position de beaucoup de chrétiens. Marine

 

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